Le Cercle Pétrarque découvre avec sidération un article publié le 24 juillet 2024, dans Le Temps, quotidien suisse renommé, qui remet en cause la connaissance historique de la construction de la pyramide de Djoser.
Sous couvert de leur expertise de paléotechniciens, dix spécialistes français du laboratoire Paleotechnic imaginent une nouvelle théorie sur les techniques utilisées par les anciens Égyptiens pour construire la pyramide de Djoser, première pyramide construite en Egypte vers 2650 avant notre ère. Bien que le journaliste Denis Delbecq précise dans son article et avec justesse avoir interrogé pas moins de 6 égyptologues qui ont, tous, réfuté cette thèse, l’angle choisi va dans le sens de ce qui est présenté comme une « hypothèse très audacieuse ».
Les auteurs français de l’article mentionné, membres du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) et de l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), publié dans la revue scientifique Plos One, imaginent que les Égyptiens auraient utilisé un système hydraulique pour hisser des blocs de plus de 350 kg au sommet de la pyramide, un système pourtant inexistant et parfaitement inutile dans le cas de la pyramide de Djoser comme l’explique Franck Monnier, ingénieur égyptologue spécialiste de l’architecture pharaonique.
« Les anciens Égyptiens étaient de formidables ingénieurs. On sait par exemple qu’ils ont mis au point des sortes de vérins à sable afin de condamner certains de leurs tombeaux. C’est un fait extraordinaire connu et reconnu. Si les textes et la réalité du terrain nous orientaient vers l’existence de systèmes hydrauliques sophistiqués, les égyptologues ne s’y opposeraient pas. Mais ça n’est pas du tout le cas. » confirme Franck Monnier.
De plus, « la pyramide à degrés de Djoser ne pose pas de réel problème technique puisque ses blocs sont relativement légers au regard des plus grandes pyramides. La plupart ne pèsent chez elle que quelques centaines de kilos. Les déplacer et les mettre en place ne requérait que des méthodes rudimentaires et relativement communes. Imaginer un tel ascenseur hydraulique, comme le font les auteurs de cet article, est donc non seulement très improbable, mais absolument inutile. » précise l’égyptologue.
« La recherche de solutions à certains problèmes posés par l’archéologie, en particulier la construction des pyramides, ne peut s’envisager sans prendre en considération toutes les informations issues du terrain, et non quelques-unes seulement triées en fonction de ce que l’on souhaite parvenir à démontrer. Elles doivent être fiables et avérées. Cette réalité observable nous indique la voie à suivre. Le cas échéant, elle nous invite à changer de direction si elle s’oppose à nos hypothèses. » conclut Franck Monnier.
« La pyramide de Djoser fut la première tentative de construction d’une pyramide dans l’histoire pharaonique. Elle fut construite comme un mastaba recouvert ensuite d’empilements de projets de pyramides, ce qui compose aujourd’hui les différents degrés toujours observables. Si ces chercheurs avaient été accompagnés d’égyptologues spécialistes de l’architecture pyramidale, ils auraient compris que leur théorie ne reposait sur aucune découverte archéologique fiable et en contradiction avec les sources, aussi bien archéologiques que textuelles », précise le Dr Jean-Guillaume Olette-Pelletier, égyptologue et chercheur associé à l’Université Paris-Sorbonne et président du Cercle Pétrarque.
Le Cercle Pétrarque s’est donné la mission de dénoncer toute tentative de réécriture de l’histoire, de diffuser la connaissance scientifique au plus grand nombre et de lutter contre les fausses informations. Nous sommes profondément attachés à la création de passerelles pluridisciplinaires dans la recherche pour apporter des éclairages d’experts différents afin de faire progresser la connaissance de l’Histoire des mondes anciens. Travailler avec des agronomes est toujours porteur pour la recherche historique et archéologique, tout particulièrement dans la connaissance des alimentations antiques et des fluctuations nilotiques dans le cas de l’Egypte pharaonique. Cependant, travailler sans les historiens et archéologues nuit profondément à la quête de vérité.
Le Cercle Pétrarque demande à la rédaction du quotidien Le Temps la publication d’un droit de réponse pour donner autant de place à l’expertise des égyptologues qui rejettent unanimement cette théorie, qu’à cet article publié en dépit de toute rigueur scientifique,. Le Cercle Pétrarque rappelle également le revirement des éditeurs de Plos One suite à la publication de l’article scientifique.
Par ailleurs, le Cercle Pétrarque invite les autorités de la recherche française, et la ministre Sylvie Retailleau à veiller au respect des principes de l’éthique scientifique en France.